Le passage de l’économie capitaliste et industrielle à l’économie du savoir est une réalité dont le Ministère de l’éducation doit prendre acte. Cette transition entre les deux systèmes économiques entraîne de nombreux bouleversements dans la manière dont nous produisons et distribuons la richesse. Ce mémoire comparera la production d’outils pédagogiques des deux systèmes économiques et présentera les avantages d’épouser la nouvelle économie. Finalement, j’exposerai un plan d’action afin que la production d’outils pédagogiques sous l’économie du savoir puisse devenir une réalité dans la prochaine année.
La création d’outils pédagogiques d’une économie capitaliste
Les capitaux
L’économie capitaliste est caractérisée par la nécessité des capitaux à la création de la richesse. Par exemple, pour démarrer une compagnie de taxi, il faut dépenser une fortune à l’achat de permis, de véhicules, aux entretiens d’embauche, en publicité, etc. La création d’outils. Dans le domaine de l’édition pédagogique, il faut dépenser de fortes sommes pour la création d’outils et leur diffusion : avoir accès à une imprimerie, avoir un éditeur et à une pléiade de vendeurs afin de rentabiliser l’investissement. L’économie du savoir est caractérisée par une certaine indifférence envers les capitaux pour créer la richesse et la diffuser. Le capital initial d’UBER est de quelques centaines de milliers de dollars et cette compagnie vaut aujourd’hui plus de 60 milliards. Serait-il possible de créer des outils pédagogiques et voir à leur diffusion avec un minimum de capitaux?
Les experts
L’économie capitaliste nécessite de faire appel à des experts reconnus, c’est-à-dire qui ont une reconnaissance officielle de leurs compétences. Ceci s’explique par un coût initial d’investissement si élevé que l’on ne peut prendre le risque de faire appel à des « amateurs » dont l’expertise n’est pas sanctionnée par une autorité reconnue. Dans le domaine du taxi, les chauffeurs sont des experts qui ont une certification reconnue et dont la qualité de leur travail est sanctionnée par un comité composé, lui aussi, d’experts dans le domaine. Dans le domaine pédagogique, les entreprises font appel à un groupe de spécialistes afin de créer et de valider leur produit. Sous l’économie du savoir, les experts cèdent le pas à des individus « amateurs » qui produisent eux-mêmes la richesse et les consommateurs vont évaluer la qualité du produit. Dans le cas d’UBER, les chauffeurs n’ont pas ou peu de formation par rapport aux professionnels du taxi et ce sont les consommateurs, et non un comité d’évaluation, qui jugent de la qualité du service. Serait-il possible de créer des outils pédagogiques de qualité sans faire appel à des experts reconnus et que ces derniers soient évalués efficacement par les utilisateurs?
Personnalisation de l’offre
Traditionnellement, l’économie capitaliste et industrielle crée un produit de masse pour les masses. Un produit unique dans sa forme et identique pour tous. Lorsque je fais appel à une compagnie de taxi, C’est un chauffeur un parmi tant d’autres qui vient me rendre service. Dans le monde des outils pédagogique, on offre au professeur un manuel qui sera le même à la grandeur du Québec sans tenir compte des spécificités régionales ou celle des professeurs. À l’ère de l’économie du savoir, on constate que les grandes entreprises vont personnaliser leur offre, c'est-à-dire que le bien ou le service va s’accommoder aux particularités de l’individu. Chacun a son propre forfait de télécommunication, un téléphone intelligent avec un étui personnalisé, etc. Cette tendance a même gagné l’élevage bovin! On ne nourrit plus un troupeau mais bien des vaches particulières avec chacune leur régime « spécial ». Au niveau du taxi, Uber permet au client de choisir son chauffeur et même à ce dernier de refuser un client. Serait-il possible de créer des outils pédagogiques assez souples afin qu’ils puissent s’adapter aux besoins spécifiques des professeurs et des étudiants?
Plusieurs pans de notre économie migrent vers l’économie du savoir et cela ne se fait pas toujours sans heurt comme nous pouvons le constater avec Uber. Il est donc pertinent, dès maintenant, d’examiner s’il est possible de produire des outils pédagogiques sous le mode de l’économie du savoir et si tel est le cas d’en évaluer les impacts.
Les avantages de ce mode de production par rapport à l’ancien sont nombreux. En voici quelques-uns.
1- Les outils pédagogiques sont libres de droits d’auteur. Cet aspect est d’autant plus significatif lorsque l’outil est dématérialisé. Un professeur qui « vend » à ses étudiants ses propres notes de cours et ses propres exercices dispensent ceux-ci de l’achat d’un manuel, mais ils doivent tout de même payer pour les photocopies. À l’ère du numérique, le coût de reproduction est de zéro. Zéro.
2- Une rétroaction et un ajustement rapide des outils pédagogiques. La mise au point d’une méthode d’enseignement pour une matière donnée nécessite une période d’essais et d’erreurs. Dans la mesure où d’autres enseignants expérimentent cette méthode,la période d’ajustement est beaucoup plus courte et rapide puisque l’expérience de ce qui fonctionne et de ce qui ne fonctionne pas est partagée « en temps réel ». Sous le mode traditionnel, il faut du temps à l’entreprise pour colliger les rétroactions des enseignants et encore plus pour effectuer les ajustements de l’outil pédagogique, particulièrement s’il s’agit d’un manuel.
3- Les micro-contributions aux outils pédagogiques sont désormais possibles. La moyenne des professeurs sont généralement bons, rarement exécrables et parfois magiques. Un livre de quatre pages sur ce que l’on fait de beaucoup mieux que les autres, quoique pertinent, trouverait peu de preneurs. Toutefois, sur une plateforme internet, cette mince contribution peut être largement diffusée.
4- Des professeurs plus compétents et des didacticiens de moindre qualité. Il est plus facile d’appliquer la pédagogie d’un autre que de créer ses propres outils. Pour améliorer la qualité de l’enseignement, on peut vouloir faire de chaque professeur un spécialiste en didactique ou rendre accessible les meilleurs outils pédagogiques disponibles. La deuxième option est plus efficiente et c’est ce que permet une plateforme mondiale.
5- Des outils pédagogiques qui couvrent l’ensemble des matières. Les entreprises cherchent à répondre aux besoins du marché de manière profitable. Lorsque le nombre de consommateurs est trop faible ou que ces derniers ne sont pas prêts à payer le prix pour que cela soit profitable, le produit n’existe pas.Certains outils pédagogiques pourraient être profitables pour la communauté mais pas pour les compagnies. Rendre possible la création d’outils pédagogique sous un mode collaboratif permettrait de créer ce genre d’outils qui autrement n’existeraient pas.